N°762

PAR VINCENT MORET

jeu d’échecs à Monaco. Le premier, Jean-Michel Rapaire, fils de Moné gasques et lui-même né en Principauté, prend la présidence du cercle et de la fédération aux débuts des années 90. Superviseur au casino de Monte-Carlo, il tente un coup de poker en rendant visite sur sa mobylette au milliardaire néerlandais Joop van Oosterom, un grand-maître par correspondance qui était alors résident monégasque. Les deux hommes topent et Joop van Oosterom sera pendant près d’un quart de siècle, et ce jusqu’à son décès en 2016, le principal mécène des échecs sur le Rocher. Grâce à cette nouvelle force de frappe, le CEMC est champion de France des clubs en 2001 et 2002. Mais, coup de tonnerre, il se retire de la compétition en 2006. « Avec le NAO de l’époque, c’était devenu une course à l’arme ment », sourit Jean-Michel Rapaire. « Et le budget devenait démesuré. » Du coup, le cercle monégasque entre prend une profonde mutation. « Avec la moitié du budget du Top 16, nous avons pu pérenniser un emploi, déve lopper la formation, et surtout mettre le paquet sur les échecs féminins. » C’est le début de la belle aventure des filles de Monaco qui vont remporter huit fois la coupe d’Europe. Record absolu pour la compétition. Jean Michel Rapaire ne regrette pas le choix de ne plus participer à la lutte pour le titre en Top 16. « Au niveau des retombées, un titre de champion d’Europe féminin par équipes nous rapporte davantage que celui de cham pion de France. » Au-delà des résultats purement spor tifs, Monaco s’est imposé depuis 30 ans comme une place forte des échecs féminins avec un bon nombre d’orga nisations prestigieuses. On peut citer pêle-mêle la finale du championnat du monde en 1993 et le match des Candidates en 2022, deux étapes du Grand Prix FIDE en 2015 et 2019 ou encore trois championnats d’Europe rapide et blitz en 2017, 2019 et 2024. Une liste loin d’être exhaustive et qui n’a pas fini de s’étoffer. L’année 2025 commence en effet en trombes, avec en janvier un 4 e championnat d’Europe rapide et blitz, suivi en février d’une nouvelle étape du Grand Prix Fide qui rassemble dix des meilleures joueuses mondiales. Avec toujours Jean-Michel Rapaire aux manettes. À l’aube de son soixantième anniversaire, le président monégasque, qui a passé plus de la moitié de sa vie à la tête de la fédéra tion et du CEMC, ne s’est pas fixé de date pour raccrocher. « Tant que la passion est là, je continue ! » g

PLÉIADE DE STARS SUR LE ROCHER En dépit de sa création dans les années 50, la fédération de Monaco a une longue tradition d’organisation d’évènements échiquéens de prestige. Quasiment tous les champions du monde de Botvinnik à Carlsen ont joué en Principauté. À l’ex ception notoire de Kasparov.

I ls ne sont certes pas aussi prestigieux que celui de formule 1 qui enflamme la Principauté chaque année depuis 1929. Mais les Grand Prix d’échecs de Monaco ont une tradition de plus d’un siècle. Les trois premières éditions avaient eu lieu dans les salons du casino en 1901, 1902 et 1903 et avaient vu les victoires de Janovsky, Maroczy et Tarrasch. Il faudra attendre presque 65 ans pour retrouver le Grand Prix de Monaco. Grâce notamment au soutien d’ Europe Échecs qui fut partenaire des trois éditions en 1967, 1968 et 1969. En 1967, Bobby Fischer s’imposa devant Smyslov. L’année suivante, en l’absence de Fischer, Bent Larsen termine premier devant Mikhaïl Botvinnik. L’ancien champion du monde Vassily Smyslov remporte la dernière édition en 1969. La tradition des Grands Prix monégas

ques reprit en 2015, mais en se canton nant cette fois aux tournois féminins. Un autre cycle de tournois permit de voir les plus grands champions à l’œuvre sur le Rocher pendant près de 20 ans grâce au mécène Joop van Oosterom. Le Melody Amber se jouait sous un format atypique, avec une phase en rapide et une seconde à l’aveugle. Les champions du monde Karpov, Anand, Kramnik et Topalov étaient des habitués. Tout un symbole, le jeune Carlsen remporta le tournoi rapide de la dernière édition en 2011. Kasparov n’a, quant à lui, jamais joué à Monaco. À l’exception d’une simultanée en 2019. g © eURoPe echecs. Bobby Fischer (à d.) face à Lombardy au Grand Prix de 1967.

QUI POUR SUCCÉDER À ANDRÉ MEYLAN ?

Les 24 participants du championnat de Monaco 2025. André Meylan (à d.) à l'Olympiade de Budapest en septembre dernier.

Le championnat de Monaco se déroulait début février. En l’absence du tenant du titre. P as de temps mort pour Jean-Michel Rapaire. Entre le championnat d’Eu rope féminin en janvier et le Grand Prix FIDE qui débutait le 17 février, le CEMC a réussi à placer le championnat de Monaco qui rassemblait 24 participants. Mais sans André Meylan, le champion en titre, empêché par des raisons profession nelles. Le Suisse est le fils d’un fort joueur qui a travaillé plusieurs années dans le secteur bancaire à Monaco. Père et fils se sont ainsi retrouvés côte à côte dans

l’équipe de Top 16 de la Principauté. En 2021, André Meylan décide de jouer pour Monaco. « Ça m’offrait plus de perspectives. » Pour preuve sa victoire en 2024 qui lui a ouvert les portes des Olympiades de Budapest, mais aussi, et surtout du championnat du monde rapide et blitz à New York en décembre. « J’étais le premier Monégasque à y participer », glisse André Meylan tout heureux d’être en si belle compagnie. En son absence, la lutte pour le titre national devrait opposer les deux GMI Amir Bagheri et Igor Efimov, avec le MI Damir Levacic en arbitre. g

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